Am Fred B.

Apologie des bulles de savon

Pierre Zaoui

Seuil

Conseillé par
16 septembre 2024

Beautés fragiles

Comment retrouver un peu de légèreté ? "Vanitas vanitatum et omnia vanitas ! " : les moralistes ont toujours pris un air grincheux pour condamner la vacuité du jeu des apparences et du culte de l'éphémère. Pourtant, le philosophe, qui s'absorbe dans la contemplation d'enfants pris dans ce jeu futile et modeste de souffler sur des bulles de savon, dans la rue ou dans des représentations artistiques, vient esquisser un éloge de cette insouciance perdue. Et si au contraire cette attention au monde, dans sa merveille et sa vulnérabilité, n'était pas notre plus grand manque ? Avancer avec innocence dans un monde sans trace, inaugurer un nouvel art d'habiter le monde avec générosité et sobriété, dans la conscience mélancolique de la joie et de la disparition, l'auteur prétend que cela n'a rien de politique ... Cela n'est pas si sûr ...
Anne-Marie

De Marathon à Athènes, les ailes aux pieds

Gallimard

Conseillé par
6 août 2024

Va courir chez les Grecs !

Après une jeunesse passée dans l'étude et la dolce vita, l'helléniste italienne se découvre une passion pour le running. Elle décide de se préparer à l'épreuve mythique du Marathon. Avec humilité, application et autodérision, elle s'étonne de ses ressources physiques et de ses motivations à exercer un corps jusqu'ici peu sollicité. Textes à l'appui, elle devient la lectrice de son propre corps. Si la course est la manifestation naturelle de l'élan vital et de l'instinct de préservation, elle procure à la passionnée de culture antique une perception nouvelle du temps, de sa propre vitalité et de sa présence au monde, en même temps qu'une confiance en elle et une conscience féministe inédites. Étape par étape, elle nourrit son entraînement - et le nôtre - de lectures et de réflexions sur ce que révèle cet engouement sur la solitude et la vanité de notre société de la performance individuelle. Serions-nous capables de courir comme un Grec pendant 42 kilomètres pour sauver notre démocratie ? Une histoire du sport et de la construction de soi - en collant fluo !
Anne-Marie

Conseillé par
5 août 2024

Roman de l'absence, fantaisie du conte cruel

"J'ai l'impression que notre Alice n'a pas envie de savoir pourquoi elle pleure", décrète la Reine psychologue consultée par la narratrice.
Longtemps, Mika et Alice furent Petit frère et Petite sœur, couple inséparable, unique et particulier, d'une famille d'artistes. Le cadet, précoce et charmant, épaulait l'aînée, rêveuse et maladroite, dans son ombre. Ils jouaient à des jeux étranges, s'inventaient des vies, défiaient les rôles convenus.
Lorsque la narratrice, devenue adulte, apprend la mort de son frère, elle ne l'a pas revu depuis sept ans. Sous le choc, elle part s'isoler dans un appartement, pour garder un chat fantomatique et retrouver une mémoire heureuse de cette enfance empreinte d'audace et de folie. Une traversée du miroir aussi cruelle que légère, par la délicatesse et la drôlerie de l'écriture du deuil et de l'émancipation. Comment Alice sort de son terrier et s'affranchit des règles imposées ! Réjouissant.
Anne-Marie

Presses universitaires de France

Conseillé par
3 avril 2024

Vita activa - Contre la société de la performance.

" Par manque de repos, notre civilisation court à une nouvelle barbarie" (Nietzsche). Philosophe jardinier - ou l'inverse ! - l'auteur de ce court essai nous invite à méditer un instant sur les raisons de notre épuisement mental. Surabondance d'informations, de stimulations, d'injonctions à la positivité et au "Yes, we can !". Notre hyperactivité n'est en somme que passivité. L'ennemi est intérieur, puisque la contrainte est intériorisée par des âmes épuisées, en guerre contre elles-mêmes. Or la création est l'enfant du rêve et de l'ennui, comme la culture est fille de l'attention. Les machines sont trop bêtes pour douter, alors que notre humanité éclôt dans l'étonnement et la contemplation solitaire. "Jamais on n'est plus actif que lorsqu'on semble ne rien faire " (Caton). Apprenons donc à voir. Simplement.
Éloge de la vie contemplative.

Anne-Marie

Conseillé par
23 mars 2024

« Depuis toujours, je suis folle des images »

C’est comme reprendre un livre depuis longtemps perdu, et qui pourtant fascine par sa fraîcheur et son énergie. Voilà une très belle surprise que cette anthologie : de 1966 à 2002, un itinéraire dans la poésie d’une auteure aujourd’hui connue comme essayiste surtout. On ouvre une porte depuis trop longtemps fermée, et vous saute aux yeux la belle audace du surréalisme flamboyant, celui de Breton et Desnos, avant que leurs continuateurs l’usent jusqu’à la corde. On revient aux sources d’un lyrisme révolté et sauvage. Annie Le Brun nous mène dans des espaces oniriques, ouvre pour nous le petit théâtre somptueux du rêve et du désir, peuplé d’images fortes - rappelons qu’elle a beaucoup fréquenté le marquis de Sade… Humour et affirmations péremptoires, provocation et gravité vont de pair. Excès aussi, c’est la loi du genre.

Comme souvent en poésie, on ne « comprend » pas tout. Parfois oui, parfois non. Et alors ? On entre, on goûte, on expérimente, on entrevoit. On rit. On se réjouit.

« La délicatesse est sauvage ou n’est pas » : tout un programme.
Frédéric